Le vice-président de la Confédération des commerçants de France, Lionel Saugues, était l’invité de France Bleu Saint-Étienne Loire à l’occasion de l’ouverture de Steel. Le nouveau centre commercial ouvre ses portes au public à 16h ce mercredi.
Lionel Saugues, vice-président de la Confédération des commerçants de France © Radio France – .
Ce nouveau centre commercial du Pont de l’Âne va-t-il tuer le centre-ville de Saint-Étienne ?
Je ne sais pas si il va tuer le centre-ville de Saint-Étienne mais il est clair que c’est une mauvaise nouvelle pour nos commerçants indépendants. C’est une mauvaise nouvelle pour le centre-ville de Saint-Étienne et plus largement c’est une mauvaise nouvelle pour les centre-villes de la Métropole.
On parle beaucoup du centre-ville de Saint-Étienne où le taux de vacance est relativement important, de l’ordre de 15% ?
Effectivement en moyenne il est de 15% mais sur certains axes commerçants il peut dépasser les 30% ce qui est très éloigné de la moyenne nationale qui est de l’ordre de 10% et du taux de vacance qu’on peut constater sur la plupart des grandes métropoles de France qui tourne autours de 5 à 7% seulement.
Au-delà du centre-ville stéphanois, l’arrivée de Steel pourrait avoir des impacts sur d’autres centre-villes, on pense à Saint-Chamond, d’autres zones commerciales, Villars, Centre-deux ?
Steel va accueillir 5 millions de visiteurs par an, donc forcément ces visiteurs là à un moment donné vont changer leurs habitudes de consommation à l’échelle de la Métropole donc l’impact va être généralisé sur le centre-ville de Saint-Étienne, sur les différents pôles commerciaux du territoire. Centre-deux en souffre déjà. On a constaté un certain nombre de fermetures d’enseignes nationales sur ce centre commercial. C’est le cas malheureusement aussi sur le centre-ville de Saint-Étienne. Dans un contexte extrêmement compliqué pour le commerce de proximité partout en France. Nous sommes encore en pleine période de Covid. Les activités commerciales ont beaucoup souffert ces derniers mois. Une étude est sortie récemment qui montre que l’activité du commerce de proximité en France a baissé d’ores et déjà de 40%. Ce qui est énorme. On sort aussi de périodes de crise sociale importantes avec les manifestations de gilets jaunes. Donc malheureusement le contexte national et l’arrivée de Steel risquent d’avoir un effet détonnant pour notre centre-ville et plus largement pour l’offre commerciale de l’ensemble de la Métropole de Saint-Étienne.
Est-ce qu’il y a eu une trahison de la promesse de départ qui était un centre commercial consacré à l’ameublement ?
Il est clair qu’il y a eu des orientations extrêmement fortes qui ont été données à l’origine et qui ont été modifiées avec le temps. J’avais décidé de démissionner il y a à peu près trois ans (NB : de son poste d’adjoint au maire de Saint-Étienne en charge du commerce) en mettant en avant que ce centre commercial allait capter des enseignes locomotives du cœur de ville de Saint-Étienne. J’avais été beaucoup critiqué à l’époque. Et malheureusement les faits se sont démontrés. Le départ d’H&M cet été qui occupait 1.300m2 en plein cœur de ville de saint-Étienne et qui a été transféré à Steel, c’est une réalité. Et quand on regarde ce qui se passe dans d’autres villes de France, on peut situer le centre commercial Muse à Metz, on s’est aperçu que trois ans après l’ouverture de Muse, qui est porté également par Apsys, le même promoteur que Steel, l’enseigne Zara qui était aussi une locomotive du centre-ville de Metz a décidé de quitter cette zone pour aller à Muse. Donc j’espère que ce que j’ai dit il y a trois ans n’ira pas jusqu’au bout et que les autres enseignes nationales, notamment sur le prêt-à-porter, je pense en particulier à Zara, à Mango également, resteront au centre-ville de Saint-Étienne.
L’ambition de Steel c’est de récupérer les 500 millions d’euros dépensés tous les ans par les Ligériens dans le Rhône. Vous n’y croyez pas ?
Ça fonctionnera en partie, heureusement d’ailleurs, mais il faut regarder l’impact général. L’offre commerciale proposée par Steel est traditionnelle. On retrouve des enseignes qu’on avait déjà à l’échelle de notre agglomération.
Cela veut dire que cela n’empêchera pas les Stéphanois d’aller à Lyon-Part-Dieu ou à Confluences ?
C’est une évidence. Et puis la difficulté de ce type de centres commerciaux c’est que d’autres opérateurs seront obligés de réagir. On peut penser à Villars qui a eu déjà par le passé des velléités d’agrandissement qui on été retoqués mais qui vont sans doute se représenter. On peut penser aussi à Givors qui va sans doute, on l’imagine, réagir. Tout ça va faire en sorte qu’on aura encore une montée en puissance des m2 commerciaux périphériques toujours au détriment de nos cœurs de ville qui devraient être la priorité de nos élus.
Un dernier mot sur la concurrence d’internet. Elle est suffisamment prise en compte ?
Il y a un vrai combat porté à la fois par le commerce indépendant mais également par le grand commerce. L’intégralité des acteurs se retrouvent. Au sein de la Confédération des commerçants de France on mène un combat très fort autours de l’implantation de ces plate-formes Amazone qui devraient arriver dans notre pays dans les prochaines années. 11 en France dont 2 en Auvergne-Rhône-Alpes. Ça fait partie des grands combats. Pour autant le e-commerce ne doit pas être un ennemi du commerce de proximité. On travaille avec de grandes marques comme Google pour que le commerce indépendant prenne aussi le virage du e-commerce. C’est essentiel.
Retrouvez l’interview en vidéo ici
Mathilde Montagnon
France Bleu Saint-Étienne Loire
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